lundi 9 juillet 2018

Japan Expo 2018, c'est fini!


Japan Expo s'achève avec son lot de fatigue mais de bonheur aussi !
Alors merci à l'accueil que vous avez fait à Rendez-vous en Enfer et aux ouvrages de Magical Witch ! Vous n'avez pas idée à quel point cela compte pour nous.



Restez alerte car à la rentrée commence une nouvelle publication de gags et... soyez prêt pour Japan Expo 2019 !



samedi 7 juillet 2018

Kazehiko 4/4



Hanako Hayashibara m'avait écouté lui raconter l'histoire de cette flûte qui lui paraissait « habitée », raison pour laquelle elle avait souhaité me consulter pour savoir à quoi s'en tenir.
- Voilà toute l'histoire de l'esprit qui possède votre flûte. Maintenant, je vous confirme qu'il est possible de l'exorciser si tel est votre souhait.
Elle réfléchit un moment.
- J'aimerais tellement être sûre de ne pas être un frein à son salut, dit-elle enfin. Mais...
Elle hésitait, préparant ce qu'elle dirait, gagnée par un léger trouble, qui restait à l'orée de la perception, comme cette sensation de l’arrivée du printemps qu'on sait là sans le voir vraiment.
- Je ne suis pas opposée à nous accorder un peu de temps, dit-elle enfin.

Je ne saurais dire ce qui dominait de la joie ou de la mélancolie dans la reconnaissance de cette union qu'une distance infranchissable marquerait jusqu'à la mort. À moins justement que réduite à cette infime subtilité, elle ne les rapprochât davantage que ne l'aurait fait la vie ? Peut-être Kazehiko lui-même s'était-il dit qu'au fond il valait mieux s'accrocher ainsi à une ombre de bonheur que d'avoir vécu sans bonheur du tout ? Et puis, peut-être qu'une ombre de bonheur peut suffire au bonheur d'une ombre ? Je ne saurais le dire.

Mais en sortant de chez elle, dans la rue, j'ai cru entendre le vent siffler à mon oreille un petit air dont le ton d'ivresse allègre m'a fait sentir moi-même léger comme le bleu du ciel.

Juin 2018, en hommage à Kenji Miyazawa

vendredi 6 juillet 2018

Kazehiko 3/4



Par la suite, Kazehiko ne rata aucun concert de cet ange pour lui descendu, allant la voir en sortie de loge à chaque fois. Un soir, il put même dîner avec elle – et les autres musiciens, mais au moins il était avec elle. Puis elle vint lui commander une flûte grave, en fa. Une telle commande spéciale était une consécration pour lui, et son patron le félicita d'avoir mérité une telle confiance d'une musicienne de talent. Mais pour lui, c'était surtout l'assurance de la voir à nouveau. Et surtout, elle avait l'air heureuse de le voir.

Malheureusement, la santé de Kazehiko ne laissa que peu de temps à son rêve. Peu de temps après avoir remis sa nouvelle flûte à la jeune femme, au comble de la félicité, il dut être hospitalisé. Avait-il trop demandé à ce corps chétif, avait-il usé prématurément un organisme qui eût demandé plus de ménagement ?

Sur son lit d'hôpital, il se sentait maintenant comme un nuage s'effilochant dans le vent, appelé à se dissiper sans retour. L'infirmière avait laissé la fenêtre ouverte pour qu'il profitât un peu de la douceur du soir.

Alors il entendit les notes. Éthérées, filtrant d'une salle quelque part, il sût immédiatement qu'elles venaient d'elle. Son souffle, son cœur, son esprit se mirent à l'unisson de cette musique. Il se sentait lui-même si diffus, qu'il finit par avoir l'impression de se fondre dans cet air, de vibrer comme si la vie lui revenait par la grâce du chaud souffle de ces lèvres.

Les bras du jeune homme pâle avaient essayé d'embrasser l'air avant de retomber. Ses yeux étaient fermés comme pour savourer un rêve. Ses lèvres fines s'étaient figées sur un léger sourire.

La plaque sur son lit disait qu'il s'appelait Kazuhiko, et c'était sans doute vrai.... Ce qui était tout aussi sûr, c'est que Kazehiko n'était plus là.

jeudi 5 juillet 2018

Kazehiko 2/4



Kazehiko donnait aussi des cours de flûte au temple. Les mères louaient sa patience, et la forte impression qu'il faisait à leur rejetons. Il n'avait pourtant aucune autorité, aucun moyen d'imposer de discipline – mais tout cela devenait vite secondaire, car quand sa flûte chantait, les enfants fascinés le suivaient joyeusement dans sa cocagne.

Ayant rencontré un facteur de flûtes, il s'était intéressé à leur fabrication, au point de s'y instruire, puis de devenir assistant. Les jours passèrent, pleins de ces hauts et de ces bas qui faisaient la vie d'un artisan – un problème avec la laque, des bambous mal séchés qui s'étaient fendus, la visite d'un flûtiste de renom venu chercher sa nouvelle flûte, et les félicitant chaudement pour la qualité de leur travail. Petit à petit, Kazehiko était reconnu, salué, même consulté.

Et puis, il alla en concert écouter une flûtiste dont il avait fabriqué la flûte. C’était la première fois que cela lui arrivait – les essais dans la boutique, ce n'était pas la même chose que cette scène éclairée, sacrifiée au public. S'identifiant au frêle instrument, il se demandait s'il serait à la hauteur. Puis elle entra dans la lumière et il oublia tout.

Il avait trouvé ce qu'il ne savait pas qu'il cherchait.

Se présentant comme le facteur de la flûte, et reconnu par un des organisateur, il alla la voir après le concert, sans même en réaliser l'audace, qui l'eût paralysé en une autre occasion. Quand elle sortit de sa loge, elle le reconnut et lui sourit. Avant même qu'il eût le temps de la complimenter, elle le remercia pour la flûte, qu'elle trouvait très agréable à jouer. Il en rosit, la complimenta en retour sur son jeu, s'inclinant beaucoup en se frottant la nuque et en riant un peu bêtement.

Il nageait dans le bonheur comme jamais.

mercredi 4 juillet 2018

Kazehiko 1/4


Les histoires magiques de Moonray


Kazehiko


Kazehiko, « prince du vent », c'est ainsi qu'il s'appelait. Je vais vous raconter son histoire, et vous laisserai en juger. Ce n'est pas un prénom courant au Japon. De fait, ses parent l'avaient appelé plus banalement Kazuhiko, « garçon harmonieux ». Mais un côté peureux et fuyant avait tôt fait de donner à ses condisciples une idée de surnom qui devait lui rester.


C'est grâce à la flûte que Kazehiko trouva un moyen de se valoriser. Transcendé par la puissance des taïko des festivals, lui qui se serait fait mal en essayant de les frapper, il faisait danser à tue-tête le chant aigu de sa shinobue sur le roulement des tambours comme une petite voile de couleur vive sur les sombres rouleaux de l'océan. Il oubliait jusqu'à son corps, se sentant devenir plus léger qu'écume, souffle, vent divin, chant solaire.


Puis, tout vide dans le silence des tambours éteints, il lui fallait un moment pour redevenir quelqu'un, et réaliser après coup comme on regarde un film que c'était lui, ce garçon qu'on avait porté sur des épaules en criant « Kazehiko ! Kazehiko ! », comme on acclame les héros, quand à peine quelques semaines avant, on lui aurait caché ses chaussures et accueilli ses larmes avec des rires, et chanté son surnom sur un air moqueur.


Comme c'était un élève docile et travailleur, il avait une plutôt bonne moyenne, et il entra au lycée. Mais derrière ce conformisme rassurant pour son entourage, son vrai nom était en train de s'inscrire dans un autre réseau.


Il s'était aussi mis à la shinobue dite « uta », moins viscérale que les flûtes de festival à gammes égales, mais qui par son accordage classique lui avait ouvert les portes du monde de la musique. Ainsi, il se mit à jouer en public avec d'autres musiciens aussi souvent qu'il le pouvait.


RDV en Enfer page 71 et 72



dimanche 1 juillet 2018

Histoire bonus en exclusivité pendant Japan Expo


J'ai écrit une petite histoire à l'occasion de Japan Expo. Une histoire en quatre pages, dont chacune sera publiée la veille des quatre jours du salon. A travers cette histoire, j'ai en particulier souhaité rendre hommage au conteur Kenji Miyazawa, auteur notamment de "Train de nuit dans la Voie Lactée" et "Goshu le violoncelliste". On y présente aussi deux instruments, que vous aurez l'occasion de retrouver à Japan Expo, et même d'essayer :
- la flûte "shinobue" : https://www.japan-expo-paris.com/fr/animations/tradi/nozomi-kanda-flute-shinobue_2325.htm
- le tambour "taiko" : https://www.japan-expo-paris.com/fr/animations/tradi/tsunagari-taiko-center_2330.htm, https://www.japan-expo-paris.com/fr/animations/tradi/satsumasendai-odori-daiko_2338.htm
J'espère que cette histoire vous plaira. Si en plus, vous sortiez de Japan Expo avec l'envie de vous mettre à jouer l'un de ces instruments, ce serait encore mieux. Toutefois, si vous étiez capturé(e) par vos voisins, Magical Witch nierait avoir eu connaissance de vos agissements.

Moonray